Zezelj nous laisse un peu d’espoir dans son deuxième roman sans paroles, Babylone. Il y présente un monde de contrastes et de conflits dans lequel se débat Lev Bezdomni. Cet artiste a été chargé par le maire de sa ville de créer un manège qui doit occuper le sommet d’une tour qui sera le building le plus élevé de la terre. Le quartier de Bezdomni avec toutes ses petites entreprises familiales est rasé pour construire la tour. Le gagne-pain de ses amis et voisins se volatilise par la même occasion. L’artiste
emprunte une idée à un dessin de sa petite-fille et fait appel à des artisans locaux (hommes et femmes) pour construire un manège qui subvertit la cérémonie organisée par le maire et recrée une nouvelle communauté entre voisins expropriés.
Zezelj bâtit ce roman sur différents symboles : les chevaux paisibles du manège et les bonnes gueules des voisins de Bezdomni contrastent avec la sauvagerie des mâchoires des pelleteuses officielles qui détruisent les magasins et les logements du quartier.
La tour démoniaque culmine d’un air plus menaçant que prometteur et semble déchirer le ciel. Elle contraste avec des éléments sereins comme les mouettes qui planent au-dessus du littoral où la communauté des voisins relogés se remet à vivre.
Le compositeur de jazz Darcy James Argue a collaboré par ailleurs avec Zezelj lors de représentations créées à partir de Babylone et intitulées Brooklyn Babylon. Zezelj en a fait l’animation ainsi que la peinture en direct d’un panneau de dix mètres de long.
Cela faisait partie du Next Wave Festival de l’Académie de Musique de Brooklyn de novembre 2011.
Zezelj est un artiste qui secoue notre conscience sociale en racontant des histoires uniquement en images. Babylone est un exemple émouvant de la puissance du roman graphique qui s’adresse en fait personnellement à tous les lecteurs de la terre, sans utiliser de mots.
David A. Beronä