têtière éditions mosquito

Extraits de Jacobs

Les artifices d'un redéploiement

image
Aujourd'hui, cependant, Blake et Mortimer sont spectaculairement de retour. Leurs aventures reparaissent en de nouvelles éditions à grand tirage, en albums d'un format un peu plus grand, avec des textes au lettrage plus régulier dans des cases parfois autrement coloriées. Depuis quelques années, leur succès s'amplifie. La série est médiatisée et, par certains produits dérivés et arguments publicitaires tapageurs, banalisée; elle se vend dans les rayons de grandes surfaces aux côtés des collections leaders (les classiques : Astérix, Tintin, Spirou, Gaston, Lucky Luke, ou les plus récentes : XIII, Largo Winch, Thorgal, Titeuf, etc.); elle est présentée en feuilleton à la télévision; les héros sont mis en poster; ils servent quantité de gadgets dans le cadre de campagnes publicitaires et commerciales bien orchestrées : figurines, portfolios, info et animations sur internet depuis 1995, dessins animés, CD, projets de film, sans compter tous les produits dérivés dans les domaines de la papeterie; ils illustrent quantité de vignettes publicitaires jusque les chéquiers de la poste en 1998, dans les brochures et les posters des campagnes de lancement de la Xantia chez Citroën, ou pour les placements financiers (opération crédit BNP-Paribas, automne 2003), etc. Ils sont en affiche à Paris pour annoncer l'exposition qui leur est consacrée au musée de l'homme (2003 - 2004).

Les personnages ou les forces en présence

Côté "mauvais", Olrik est le type du mercenaire prêt à servir les causes les plus nocives. "Aventurier habile et sans scupule", selon les mots de la première case du Secret de l'Espadon, où il est le premier acteur nommé de la saga, on le retouve du côté des dictateurs et des tyrans, tel l'empereur paranoïaque Basam-Damdu, le traîte Magon, ou de mauvais savants, ivres de pouvoir et de revanche, tels les professeurs Septimus et miloch, ou des assistants félons (l'Egyptien Abdul, le Coréen Kim, le docteur Sun Fo, etc.). Il est entouré d'une bande de gredins avides de pillage, au premier rang desquels Sharkey, le "gorille", Herman, Razul le Bendzedjas, Sadi, etc. - liste à laquelle il faut ajouter tous ceux qui nagent en eaux troubles, le marchand Youssef Khadem, le joaillier Duranton-Claret, le journaliste Tetsuro Tomihiro, etc. Avec Olrik, on ne peut imaginer scélérat plus absolu; c'est la crapule sans peur et sans reproche, qui peut assister aux pires atrocités qu'il programme, "sans qu'aucune trace d'émotion ne vienne altérer les traits de son visage de forban", selon une expression de Van Hamme dans l'Etrange Rendez-vous.
image

Le temps des nouvelles guerres mondiales

image
Dans l'immédiat, sur le plan politique, l'équilibre de la terreur est certainement pour Jacobs le moindre mal; il permet au camp occidental de maintenir son espace de paix intérieure, de liberté et de niveau de vie. Auparavant, c'était le chaos des révoltes sanglantes et la misère du grand nombre; demain, cela risque d'être pire; les mécanismes d'assujettissement des consciences sont en marche. Le prologue du Piège diabolique donne le ton; écoutant deux hommes regretter l'un le passé, l'autre le futur, le capitaine Blake - qui n'aura pas d'autre rôle dans l'histoire - médite : "Passé! Futur! - Qui sait si le "bon temps" dont vous rêvez n'est pas tout simplement... le temps présent, gentlemen !" Mortimer reprend le même thème pour conclure l'histoire : "Et maintenant, ami lecteur, je voudrais, avant de nous séparer, tirer de cette singulière aventure la morale qui s'impose : Ne nous plaignons pas outre mesure de notre damnée époque car elle a de bons côtés! Et qui sait si un jour, en l'évoquant, vous ne direz pas à votre tour : c'était le bon temps!!!

Les continuateurs de la série ont repris ces "leçons de morale" qui accentuent le caractère "rétro" recherché. Car c'est bien la morale qui protège l'homme des méfaits de la science. Ainsi du discours final du Home Secretary Sir Geofffrey Bannister dans l'Affaire Blake, p.68; du toast de Mortimer à la fin de la Machination Voronov, p.62; des leçons à tirer pour l'avenir de la planète dans l'Etrange Rendez-vous, p38 et 66, avec la sentence de Sir Reginald : "Nous devons léguer à nos enfants, et aux enfants de nos enfants, ce que nous ont légué nos ancêtres : une terre propre. Une planète qui soit digne de ce qu'il y a de meilleur en l'homme : l'espoir d'une sincère fraternité entre tous les peuples du globe."
image
Fermer la fenêtre